Qui êtes-vous ?

Jerusalem, Israel
Journaliste indépendante, je suis installée à Jérusalem depuis septembre 2009, après avoir vécu à Kaboul (Afghanistan)de janvier 2007 à décembre 2008. Lors de ces deux années, j'ai couvert pour plusieurs media, l'actualité afghane. Presse écrite, radio ou encore télé, j'ai multiplié les collaborations en radio et presse écrite. Correspondante de RFI, RTL, Radio Vatican, France Info, France Inter, France Culture et I télé, Le Parisien, L'Equipe Magazine, Le Figaro, Figaro Magazine, CB News, La Nouvelle République. Rentrée pour quelques mois en France, j'ai effectué quelques CDD chez RFI avant de repartir m'installer à l'étranger.

22/08/2009

Elections afghanes... vous avez dit succès?

Le dépouillement à peine terminé et déjà les deux favoris, Hamid Karzai et Abdullah Abdullah s’autoproclament vainqueurs des élections présidentielles. Des annonces plus que surprenantes alors que la Commission Indépendante Electorale afghane a prévu de rendre les résultats définitifs du premier tour le 3 septembre prochain.


Qui a tort ? Qui a raison. En théorie, Karzai et Abdullah seraient au coude à coude. Une égalité engendrée par le très faible taux de participation. De source diplomatique anonyme on apprend qu’il s’étale entre 25 et 35% sur tout l’Afghanistan. Le sud pachtoun, pro-Karzai a difficilement pu se rendre aux urnes à cause des combats et de l’insécurité alors que le nord tadjik favorable au Docteur Abdullah a massivement voté (avec un taux entre 60 et 70% de participation). Dans la capitale afghane, c’est moitié-moitié, et à l’ouest, les observateurs pensent que Karzai est majoritaire.
Mais c’est sans compter les fraudes qui, malgré ce que dit la communauté internationale, ont été massives. « Le problème n’est même pas de savoir qui a gagné, le problème ce sont les fraudes » explique Homayun Assefy, vice-président du docteur Abdullah. Tous les candidats s’accusent mutuellement d’avoir truqué les élections. Les moyens sont divers : achats de vote, remplissage des urnes avec de faux bulletins, complicité des membres de la Commission Indépendante Electorale afghane (dont les membres ont été nommés par Hamid Karzai), urnes rapportées chez des particuliers, doubles votes, etc. Le bureau du Docteur Abdullah a déjà déposé une centaines de requêtes à la Commission des Plaintes.
Reste à savoir quel rôle va jouer ici la communauté internationale. Déjà le soir même des élections, l’OTAN et les Nations Unies se félicitaient du bon déroulé du processus électoral. Les Taliban ont pourtant attaqué en de nombreux districts, les Afghans ne se sont pas déplacés pour voter et les fraudes étaient bien là. Mais la communauté internationale ne peut scier la branche sur laquelle elle est assise : dire que les élections sont un échec reviendrait à décrédibiliser sa présence en Afghanistan. Après 8 ans dans ce pays et 230 millions de dollars dépensés pour ces élections, le bilan doit être positif.
Quel qu’il soit, le perdant utilisera l’argument des fraudes pour contester le résultat et le gagnant manquera de légitimité auprès du peuple afghan. « On ne veut pas déclencher un mouvement populaire qui serait incontrôlé et incontrôlable. Ici, les gens sont armés et c’est dangereux. Si l’on encourage les émeutes on ne pourra les arrêter » analyse Homayun Assefy.
Constance de Bonnaventure

21/08/2009

Les Afghans aux urnes

7h du matin, la ville de Kaboul, habituellement réveillée à cette heure-ci donne l’impression qu’elle dort encore. A l’heure où les bureaux de vote doivent ouvrir leurs portes, l’atmosphère est étrangement calme. Les rues sont vides, toutes les boutiques sont fermées, il n’y a pas un taxi, seules quelques voitures qui se font arrêter et sont scrupuleusement fouillées par la police afghane. Les chars de l’armée sont prêts à bondir et des hélicoptères tournent dans le ciel. Cet arsenal de sécurité déployé pour l’occasion contraste avec l’aspect fantôme de la ville en ce matin des élections. Visiblement les Afghans ont préféré rester chez eux. Les menaces des insurgés Taliban ont été prises au sérieux. « C’est à cause de la sécurité s’il n’y a personne. Les gens ont un peu peur. Ils ne préfèrent pas venir dans les centres de vote aujourd’hui» explique Massoud qui gère un petit bureau de vote dans une mosquée. Ici, sur 400 inscrits, seuls 48 sont venus voter…
Zargunah School, école de fille, est l’un des plus gros centres de vote de la capitale afghane. Située dans un quartier résidentiel à quelques pas du centre ville de Kaboul, ce bureau de vote a prévu de recevoir près de 10 000 personnes selon la Commission Indépendante Electorale afghane. Pourtant, deux heures après l’ouverture, il n’y a qu’une petite queue d’une quarantaine de personnes. Et à la mi-journée, on ne compte qu’un millier de votants. Les femmes d’un côté, les hommes de l’autre. Munis de sa carte électorale, Ahmad, s’avance pour tremper son doigt dans l’encre indélébile qui permet d’éviter les doubles votes. On lui remet deux bulletins : l’un pour les présidentielles où il devra choisir parmi 31 candidats, l’autre pour les provinciales. Pour ceux qui ne savent pas lire, les photos des candidats sont accolées à leurs noms. Ahmad part ensuite se cacher derrière son isoloir en carton. Sa carte électorale est poinçonnée pour prouver qu’il a voté. Tous les moyens sont réunis pour éviter les fraudes, très probables. C’est ainsi que dans ces centres de votes, les organisateurs et observateurs sont parfois plus nombreux que les votants. Parmi eux, Philippe Larrieu, conseiller à l’ambassade de France, et observateur de l’Union Européenne. Il a à sa charge huit bureaux de vote qu’il doit visiter pour noter les éventuels dysfonctionnements. « On a vu par exemple que les perforeuses servant à poinçonner les cartes pour prouver le vote ne fonctionnaient pas. Alors les afghans font des trous avec leurs ciseaux…Un votant souhaitait reprendre son bulletin dans l’urne car il s’était trompé.. Mais nous on ne peut rien dire, on observe, c’est tout. »
Dans le reste du pays, des attaques sporadiques ont été recensées malgré l’ordre du gouvernement Karzai aux media de ne pas relayer les violences. Dans les provinces du sud, ce sont des dizaines de bureaux de vote qui n’ont pas pu ouvrir. A Kapissa, province où sont basés les soldats français, des combats ont empêché les citoyens de se rendre aux urnes.
Le président sortant Hamid Karzai reste optimiste et qualifie cette journée de « succès ». « Le peuple afghan a défié les roquettes, les bombes et les intimidations pour venir voter. Nous verrons quelle sera la participation mais ils sont venus voter c’est formidable ».
Outre la sécurité, le manque de confiance en la politique a favorisé cette forte abstention. « Ca n’avait pas de sens pour moi d’aller voter. Je n’ai confiance dans aucun des candidats. Je n’y crois pas » explique Atiq, jeune directeur d’une boite de communication afghane. Dans son entreprise, des 40 employés, aucun n’est allé voter jeudi.
Constance de Bonnaventure

20/08/2009

De la fraude, encore de la fraude....

A voté ! Ce matin, comme des millions d’autres afghans, Ahmed choisit son prochain président. Fier, il s’avance vers les urnes pour déposer son bulletin de vote. « Aujourd’hui est un grand jour pour la nation afghane. Parce que les élections ont lieu et ça renforce la démocratie » 7h du matin, c’est l’heure où les 6000 bureaux de vote ouvrent leur porte en Afghanistan. L’école de fille Zarghuna est l’un des plus gros centres électoraux de la capitale. Ici on attend 10 000 personnes, mais pour le moment, les allers et venues sont plutôt calmes dans ce centre de vote. Les hommes d’un côté, les femmes de l’autre, on trempe le doigt dans l’encre, on prend le bulletin, et on se cache derrière l’isoloir en carton. Et déjà les premiers dysfonctionnements apparaissent. Un jeune organisateur remarque que l’encre utilisée pour marquer les votants n’est pas de très bonne qualité. « Ca va pas ça. Ca devrait être mieux. Parce que quand on frotte elle part. Elle devrait être indélébile et elle s’efface. »
En ce jour d’élection, deux inquiétudes majeures hantent les esprits: les fraudes et l’insécurité. D’autant plus que les Taliban ont promis qu’ils s’attaqueraient aux bureaux de vote. Pour l’occasion, 4000 policiers supplémentaires sont arrivés à Kaboul et des checkpoints, des postes de contrôle ont été installés aux principaux carrefours de la capitale. Et des chars de l’armée afghane sont sur le qui-vive. Ce matin, personne dans les rues, la tension est à son comble, Kaboul est une ville fantôme.
L’école de Massoud Sad est située dans un quartier résidentiel, loin des attentats. Elle abrite un petit centre de vote. Et en ce milieu d’après-midi, il n’y a personne qui vote. « C’est bien, mais pas super. Peu de gens ont participé » déplore le responsable de ce centre. Ici sur 600 inscrits seuls 48 se sont rendus aux urnes. Visiblement les Afghans se désintéressent de la politique. Alors comme dans beaucoup de bureaux de vote, il y a plus d’organisateurs que d’électeurs.Bérangère Travard travaille au service culturel de l’ambassade de France. Mais aujourd’hui elle fait partie des 117 observateurs de l’Union Européenne. Son rôle : rendre compte du processus électoral. 8 centres de vote à visiter et des questions à poser. « Est-ce qu’il y de l’intimidation ? Est-ce plutôt ordonné ou pas ordonné ? Qui sont les personnes présentes ? Est ce que tout le matériel est présent ? Est-ce qu’ils vérifient que les doigts n’ont pas d’encre ou de l’encre ? Est-ce qu’ils mettent l’encre sur les doigts ? »La Communauté internationale met tout œuvre pour limiter les fraudes et crédibiliser ces élections. D’après les observateurs, rien pour le moment ne permet de remettre en question la légitimité du scrutin. Philippe Larrieu est également observateur européen. « A partir du moment où on se rend compte qu’il n’y a pas d’irrégularités flagrantes, ce qui est le cas, on peut considérer que s’agissant du processus de vote, du processus électoral, la mission est accomplie »
Le dépouillement à peine terminé, Hamid Karzai et Abdullah Abdullah, les deux favoris, s’auto proclament vainqueurs. De quoi alimenter les rumeurs de fraude et nourrir fortement la colère de la population afghane.

Elections afghanes: J-1

A 7 heures du matin, les portes des bureaux de vote s’ouvrent en Afghanistan. Pour la seconde fois dans leur histoire, les Afghans se rendent aux urnes. Une journée placée sous le signe de la pression et de la tension. Pression de la part de la communauté internationale qui voudrait faire de cet événement un succès. Tension parce que les insurgés Taliban ont promis qu’ils s’attaqueraient aux bureaux de vote et demandé aux Afghans de ne pas s’y rendre. Pour éviter la panique et favoriser la participation, le gouvernement a demandé aux journalistes locaux et étrangers de ne pas relayer les violences qui auront lieu dans le pays en cette journée cruciale. Sous peine, pour les media afghans de voir leurs bureaux fermés, et pour les étrangers, d’être expulsés d’Afghanistan.
Mais dans les régions du sud, frappées par les combats entre taliban et soldats de l’OTAN, et dont certains districts sont sous contrôle des insurgés, il sera impossible pour les citoyens d’aller voter.
Dans le centre ville de la capitale, c’est plutôt le calme qui régnait la veille du scrutin. D’autant plus que les Afghans fêtaient hier la fête de l’indépendance et pour l’occasion le jour était fériée. Seules les voitures des policiers et de l’armée afghane circulaient sur les axes principaux, les habitants ont préféré éviter le centre ville. Mais en ce jour de vote, les 100 000 militaires étrangers de l’OTAN et les 175 000 policiers et soldats afghans sont sur le qui-vive.
Selon la commission électorale indépendante, 17 millions d’Afghans sont inscrits sur les listes électorales, dont 40% de femmes. Les divers candidats avaient jusqu’à lundi soir pour faire campagne. Le dernier sondage, réalisé par l’International Républicain Institute donnait le président sortant, Hamid Karzai comme favori avec 44% des intentions de vote, suivi du Docteur Abdullah Abdullah (26%), ancien ministre des Affaires étrangères. Viennent ensuite Ramzan Bachardost (10%) dont le programme est basé sur la lutte contre la corruption, puis l’ancien ministre des Finances Ashraf Ghani (6%). Impossible de dire pour le moment s’il y aura un second tour. Les résultats définitifs sont prévus pour le 3 septembre prochain.
Constance de Bonnaventure

19/08/2009

Elections afghanes: désillusions et frustrations de la population afghane

Zarmina et Nader Khan vivent avec leurs sept enfants dans un quartier pauvre de Kaboul. Pour se loger, ils n’ont qu’une pièce au loyer de 2000 afghanis (30 euros) par mois. Nader Khan, le père, est maçon. Son fils cadet est employé dans une usine de briques et Abdul Qader, l’aîné, ne trouve pas d’emploi alors qu’il est diplômé de l’école d’instituteur. « Toute la jeune génération souffre du chômage. Nous n’avons plus aucun espoir. Dès que j’ai de l’argent je quitte l’Afghanistan » affirme Abdul Qader. Une pensée qui traverse l’esprit d’une grande partie de la jeunesse afghane. Ils sont de plus en plus nombreux à partir à l’étranger comme clandestin, en Europe, en Inde ou encore en Iran.
Le quotidien de cette famille ressemble à celui de la majorité des Afghans, à part quelques chanceux qui ont pu trouver du travail dans les organisations internationales où les rares entreprises afghanes. A Kaboul, ville pourtant arrosée par l’aide internationale, les habitants n’ont toujours pas l’eau courante ni l’électricité 24h/24. Un quotidien difficile qui nourrit les frustrations des Afghans. « En 2001 quand les Taliban ont été chassés, nous avions beaucoup d’espoir ! La situation était plutôt bonne jusqu’en 2005. Et puis, tout s’est dégradé : l’économie et la sécurité. Notre gouvernement est malade, malade de la corruption. » déplore Nader Khan qui, malgré ses désillusions votera pour Hamid Karzai.
Corrompu, proche des trafiquants de drogue et des seigneurs de guerre, marionnette des Américains, voilà les critiques que l’on entend le plus souvent à son égard. « Je déteste Karzai, parce qu’il a été inefficace, qu’il se fait de l’argent avec le trafic de drogue. Mais je ne sais pas pour qui voter. Je ne connais pas les autres candidats. Au moins Hamid Karzai a de l’expérience » explique Hamidullah, qui tient une échoppe dans le village de Deh Sabz, au sud-est de Kaboul. D’autres continuent de voir en lui celui qui a apporté la paix en 2002 et les quelques changements qui se sont opérés dans la vie quotidienne. « Grâce à lui nous avons pu retourner à l’école, il nous a apporté la stabilité et notre vie a beaucoup changé depuis qu’il est au pouvoir » explique Shakira, étudiante de 18 ans.
Qu’ils soient pour ou contre Hamid Karzai, beaucoup d’Afghans voteront pour lui. La toute nouvelle démocratie a du mal à s’imposer et les Afghans préfèrent se référer aux choix de leurs leaders locaux : chef de village, figure ethnique ou encore seigneur de guerre, ils influenceront les votes des citoyens afghans.

18/08/2009

Elections afghanes: fin de campagne

Malgré les efforts de déstabilisation menés par les Taliban, la campagne électorale se poursuit, presque que comme si de rien n’était. Les Taliban ont pourtant revendiqué l’attentat qui a fait 7 morts samedi en face du quartier général de l’OTAN. Et pour la première fois, ils ont menacé hier de s’attaquer aux bureaux de vote. Une menace formulée par l’intermédiaire d’affichettes accrochées aux murs des villages du sud afghan. « Voilà qui informe les honorables résidents qu’ils ne devraient pas participer aux élections s’ils ne souhaitent pas être victimes de nos opérations. Car nous allons utiliser de nouvelles tactiques » pouvait-on lire. Une manière de prévenir la population. Dans ces conditions, le gouvernement aura certainement du mal à contrôler l’ensemble du pays le jour du vote, notamment les provinces du sud déjà sous très forte influence talibane.
Pour autant, rien n’arrête la motivation des deux principaux concurrent du président Karzai, Abdullah Abdullah et Ashraf Ghani. Aujourd’hui encore, Ashraf Ghani se rendait à Jalalabad, ville de l’est du pays, après avoir parcouru tout le sud du pays samedi. Quant au Docteur Abdullah, ancien conseiller de Massoud, il est prévu qu’il fasse son dernier meeting au stade de Kaboul. Le président afghan Hamid Karzai se fait lui, beaucoup plus discret, il parait même assez absent de la campagne bien que l’on aperçoive son portrait un peu partout dans la capitale. Il a préféré laisser cette tâche à ses colistiers, tous des anciens « seigneurs de guerre », espérant ainsi drainer plus de soutien. A la grande surprise générale, il a refusé de participer au premier débat télévisé, laissant sa chaise vide entre Abdullah Abdullah et Ashraf Ghani. Mais il a finalement accepté hier soir, de participer au second débat, un moment attendu avec impatience par les téléspectateurs.
Chacun des candidats aborde de manière récurrente les thèmes qui touchent de près les Afghans. La corruption, l’insécurité croissante et la lutte contre la pauvreté en sont les principaux. Ajoutons à cela la polémique des victimes civiles dues aux bombardements aériens de l’OTAN, un sujet devenu très sensible chez les Afghans. « Si je suis élu, je ferai en sorte que les Afghans ne tuent pas d’autres Afghans, que les Afghans ne soient pas tués par des étrangers. Si Dieu le veut, nous mettrons un terme à l’anarchie et à la corruption » déclarait le Docteur Abdullah lors d’une visite dans la province de Paktia au sud-est du pays.
Dans la capitale, des portraits des divers candidats et colistiers ont été accrochés partout et des bureaux de campagne ont été ouverts dans de nombreux quartiers pour promouvoir les programmes de chacun. Les candidats ont jusqu’à ce soir minuit pour clore leur campagne avant un silence médiatique obligatoire de 48h.


Les deux principaux rivaux d’Hamid Karzai
Ashraf Ghani Ahmadzai, économiste, appartient à la tribu majoritaire pachtoune. Avec ses parents, il quitte très vite l’Afghanistan et poursuit des études au Liban puis aux Etats-Unis où il obtient la nationalité américaine. Il rejoint la Banque Mondiale après une carrière de professeur en Europe et aux Etats-Unis. Ancien ministre des Finances sous Hamid Karzai (jusqu’en 2004), il sera aussi un de ses conseillers spéciaux.
Abdullah Abdullah, médecin, est moitié pachtoun, moitié tadjik (ethnie de Massoud). Très proche du commandant Massoud pendant la guerre contre les Soviétiques, il occupera en 1997 la fonction de ministre des Affaires étrangères, poste qu’il gardera sous la présidence d’Hamid Karzai (jusqu’en 2005).

17/08/2009

Les Afghans et l'armée française...désillusion

Un an après l’embuscade qui a couté la vie à dix soldats français, la situation sur place ne s’est pas améliorée, ni pour la population afghane, ni pour le contingent français.
Des véhicules militaires français filent à toute vitesse sur la nouvelle route goudronnée. Rangés en colonne, ils se rendent à Deh Sabz, banlieue pauvre de Kaboul à environ cinq kilomètres du centre de la capitale, une des zones dont ils ont la charge. Anxieux, ils font de grands signes aux voitures qui les suivent de trop près, avant de viser au Famas les quelques effrontés qui oseraient trop s’approcher. Comme tous les jours, ils partent en patrouille. Les quelques commerçants installés au bord de la route, comme Hamidullah, ne les regardent même plus passer. Ils ont l’habitude. « Ils sont là tous les jours. Mais nous ça ne nous dérange pas. Ca fait plusieurs années que c’est comme ça ». A quelques kilomètres de là, un petit village reculé reçoit quant à lui la visite quotidienne de patrouilles à pied. Les soldats descendent de leurs véhicules blindés et marchent dans les villages, armés, casqués et vêtus de gilets pare-balles. L’objectif est non seulement de faire acte de présence mais aussi de rencontrer le chef du village, lui demander ce dont ses villageois ont besoin, en échange de quoi ce dernier leur donne des informations sur la sécurité. Mohammed Nazer vit ici. Il creuse des rigoles qui serviront à l’irrigation de son champ. « Regardez, les Français nous ont construit une clinique là-bas. Alors oui, on les aime bien » dit-il en riant. « Nous on ne fait pas la différence entre les Français, les Américains et les autres. Ce sont tous les mêmes. Je pense qu’ils sont venus nous apporter la paix mais aussi chercher du pétrole. Tant qu’ils ne nous font pas de mal, nous on ne s’en plaint pas ». La situation est totalement différente dans la province de Kapisa où sont déployés environ 700 soldats français du 3e RIMA (Régiment d’Infanterie de Marine). Ici, les combats entre insurgés taliban et militaires ont lieu tous les deux jours. Les populations sont les premières victimes des bombardements aériens et sont prises en étau entre les insurgés taliban et les forces françaises. Enayatullah Kouchi est membre du conseil provincial. Il est assez pessimiste sur l’avenir de sa province. « Les gens ici souffrent beaucoup de la situation, des bombardements, des patrouilles militaires récurrentes, de l’insécurité. Ils se sentent oubliés par le gouvernement. Alors ils tournent le dos aux forces étrangères et certains rejoignent le rang des insurgés ».
Un an après l’embuscade meurtrière du 18 août, le contingent français en Afghanistan, fort de 2900 hommes, poursuit sa mission d’assistance à la sécurité et de formation de l’armée nationale afghane. Mais son regard sur la situation a changé, l’Afghanistan est désormais considéré comme un terrain de guerre. En se déployant dans la province de Kapisa, la France est devenue une cible privilégiée pour les insurgés afghans. C’était la première fois que les soldats français faisaient face à une bataille de cette ampleur. Depuis son engagement en Afghanistan en 2002, la France a déjà perdu 29 soldats.
Constance de Bonnaventure

15/08/2009

Elections afghanes: Kaboul placée sous haute sécurité

Kaboul ressemble de plus en plus à un véritable bunker. Au fil des jours, à mesure que la sécurité se dégrade, la ville se transforme. Dans le quartier de l’ambassade américaine ou encore celui du Ministère de l’Intérieur, les bâtiments sont entourés de blocs de béton hauts de cinq mètres et protégés par des gardes armés. Les maisons des étrangers sont encerclées de fils barbelés et ces derniers se déplacent rarement sans leurs voitures blindés.
En cette période électorale, tous les moyens sont réunis pour sécuriser la ville au maximum. En apparence du moins. On ne peut y faire 100 mètres sans croiser un convoi militaire de l’OTAN ou un checkpoint de la police afghane. Il faut dire que les menaces d’attentat sont constantes. Hier, des roquettes ont touché le palais présidentiel et un attentat qui visait un convoi de l’OTAN a fait sept morts. Alors les forces de sécurité afghanes redoublent de vigilance en cette période clé. Pour l’occasion, des chars de l’armée afghane ont été positionnés sur les grands carrefours de la capitale et des policiers assureront la sécurité au sein des 700 bureaux de vote dans Kaboul ce jeudi. Le commandant Zalmai, policier, est en charge du rond-point de Wazir Akbar Khan, un quartier surprotégé puisqu’on y trouve des maisons d’expatriés, des ambassades ou encore des sièges d’organisations internationales. « La situation est normale, c’est comme d’habitude. Seulement, nous faisons beaucoup plus attention car nous savons que quelque chose peut arriver. Nous devons être opérationnels. En ce moment on arrête beaucoup de véhicules, on les fouille et on saisit les armes. C’est notre boulot, ça ne nous fait pas peur ». En cas de panique, la police afghane sait qu’elle peut compter sur les forces étrangères de l’OTAN. « Nous n’avons qu’à les appeler et ils arrivent au plus vite » poursuit le commandant Zalmai.
Du côté des expatriés, rien n’est pris à la légère. Et c’est presque toute la communauté étrangère qui s’envolait de Kaboul ce mercredi. Aucune hypothèse n’est épargnée et les organisations internationales ne préfèrent pas prendre de risque. Hervé Nicolle, français, travaille à Kaboul au sein d’un programme de développement des ministères afghans pour un organisme américain. « Chez nous, les mesures de sécurité sont prises au jour le jour, en fonction des événements. Pour les élections, nous sommes priés soit de quitter le pays, soit d’être enfermés dans un domicile ultra-sécurisé sans en sortir, du 18 au 24 août ». Une décision qui choque beaucoup d’Afghans, comme Nazir, chauffeur de taxi. « Regardez, aujourd’hui il n’y a plus personne dans les rues de Kaboul ! C’est fou ! C’est parce que tous les étrangers sont partis ! Pourtant ils sont censés être là pour nous aider ! » dit-il en riant.