Le dépouillement à peine terminé et déjà les deux favoris, Hamid Karzai et Abdullah Abdullah s’autoproclament vainqueurs des élections présidentielles. Des annonces plus que surprenantes alors que la Commission Indépendante Electorale afghane a prévu de rendre les résultats définitifs du premier tour le 3 septembre prochain.
Qui a tort ? Qui a raison. En théorie, Karzai et Abdullah seraient au coude à coude. Une égalité engendrée par le très faible taux de participation. De source diplomatique anonyme on apprend qu’il s’étale entre 25 et 35% sur tout l’Afghanistan. Le sud pachtoun, pro-Karzai a difficilement pu se rendre aux urnes à cause des combats et de l’insécurité alors que le nord tadjik favorable au Docteur Abdullah a massivement voté (avec un taux entre 60 et 70% de participation). Dans la capitale afghane, c’est moitié-moitié, et à l’ouest, les observateurs pensent que Karzai est majoritaire.
Mais c’est sans compter les fraudes qui, malgré ce que dit la communauté internationale, ont été massives. « Le problème n’est même pas de savoir qui a gagné, le problème ce sont les fraudes » explique Homayun Assefy, vice-président du docteur Abdullah. Tous les candidats s’accusent mutuellement d’avoir truqué les élections. Les moyens sont divers : achats de vote, remplissage des urnes avec de faux bulletins, complicité des membres de la Commission Indépendante Electorale afghane (dont les membres ont été nommés par Hamid Karzai), urnes rapportées chez des particuliers, doubles votes, etc. Le bureau du Docteur Abdullah a déjà déposé une centaines de requêtes à la Commission des Plaintes.
Reste à savoir quel rôle va jouer ici la communauté internationale. Déjà le soir même des élections, l’OTAN et les Nations Unies se félicitaient du bon déroulé du processus électoral. Les Taliban ont pourtant attaqué en de nombreux districts, les Afghans ne se sont pas déplacés pour voter et les fraudes étaient bien là. Mais la communauté internationale ne peut scier la branche sur laquelle elle est assise : dire que les élections sont un échec reviendrait à décrédibiliser sa présence en Afghanistan. Après 8 ans dans ce pays et 230 millions de dollars dépensés pour ces élections, le bilan doit être positif.
Quel qu’il soit, le perdant utilisera l’argument des fraudes pour contester le résultat et le gagnant manquera de légitimité auprès du peuple afghan. « On ne veut pas déclencher un mouvement populaire qui serait incontrôlé et incontrôlable. Ici, les gens sont armés et c’est dangereux. Si l’on encourage les émeutes on ne pourra les arrêter » analyse Homayun Assefy.
Constance de Bonnaventure